Gravir l’Everest, le toit du monde culminant à 8 849 mètres, est le rêve de nombreux aventuriers. Récemment, le youtubeur français Inoxtag a partagé son expérience dans un documentaire intitulé Kaizen: 1 an pour gravir l’Everest, un projet qui a fait grand bruit. La diffusion de ce film a suscité à la fois fascination et critiques, poussant à poser la question : Est-ce que tout le monde peut gravir l’Everest comme Inoxtag ?
Cet article va explorer les multiples aspects de cette question, de l'effort nécessaire pour atteindre le sommet aux risques et réalités parfois oubliés derrière l’exploit médiatisé.
L’Everest, un sommet légendaire mais dangereux
L’Everest, situé entre le Népal et le Tibet, est bien plus qu’une montagne : c’est un symbole de l’exploit humain. Mais sa hauteur et ses conditions extrêmes rendent son ascension périlleuse. Les dangers incluent le froid glacial, le manque d’oxygène à haute altitude, les avalanches, et des tempêtes soudaines pouvant se déclencher à tout moment. En dépit de la couverture médiatique qui peut donner l’impression d’une expédition accessible, chaque année des vies sont perdues sur les pentes de l’Everest.
Statistiques alarmantes : environ 300 personnes ont perdu la vie en tentant l’ascension de l’Everest depuis sa première conquête en 1953. Chaque année, des décès sont signalés parmi les grimpeurs, mais aussi parmi les sherpas, ces guides locaux essentiels pour les expéditions.
L'ascension d’Inoxtag : une prouesse médiatique
En 2024, Inoxtag, de son vrai nom Inès Benazzouz, a réalisé son rêve d’enfance en gravissant l’Everest, après un an d'entraînement intense. Son documentaire, Kaizen, a rapidement cumulé des millions de vues, capturant l’attention de son public, en particulier les jeunes. Cependant, cette ascension ne s'est pas faite sans aide.
Inoxtag a été encadré par une équipe de professionnels, dont des sherpas, guides expérimentés qui ont rendu son ascension possible. L'un des éléments marquants du documentaire est son focus sur les efforts du youtubeur pour atteindre son objectif, mais certains observateurs ont critiqué le manque de reconnaissance explicite du rôle crucial des sherpas et des aspects environnementaux de l'expédition.
L’accessibilité du sommet : un mythe ou une réalité ?
Le documentaire d’Inoxtag a soulevé la question de l’accessibilité de l’Everest pour le grand public. Alors que certains affirment que, avec assez de volonté et de moyens financiers, l’ascension est à la portée de tous, d’autres experts pointent du doigt les dangers sous-estimés.
Les conditions physiques et mentales sont primordiales. Gravir l’Everest requiert un corps entraîné pour supporter des conditions extrêmes, un esprit résistant à l’adversité, et une préparation minutieuse à la haute altitude. Une acclimatation à l’altitude, en gravissant d'autres sommets plus modestes au préalable, est également essentielle pour réduire les risques de maladies liées à la faible pression d'oxygène.
Les coûts élevés : financer une expédition vers l’Everest n’est pas à la portée de tout le monde. Il faut compter environ 45 000 à 110 000 euros par personne, selon le type de service choisi. Cela comprend le permis d’ascension (dont le prix augmente régulièrement), l’accompagnement par un guide, l’équipement, ainsi que les coûts liés aux oxydes supplémentaires pour compenser la rareté de l’oxygène en altitude.
La marchandisation de l’Everest : un phénomène préoccupant
La popularité de l’Everest a transformé ce sommet légendaire en une destination touristique prisée, souvent au détriment de la sécurité des grimpeurs. Depuis les années 1990, les expéditions commerciales se sont multipliées, rendant l’accès plus facile pour des grimpeurs amateurs prêts à débourser de grosses sommes d’argent pour vivre "l'expérience Everest".
Le résultat ? Une surfréquentation dangereuse. Des embouteillages d’alpinistes s’agglutinent sur les pentes étroites, comme le célèbre glacier du Khumbu, augmentant les risques d’accidents mortels. La fenêtre météo propice à l’ascension est étroite, généralement limitée à quelques jours en mai, ce qui crée une congestion parfois fatale.
Le tourisme d’altitude est souvent critiqué pour avoir dénaturé l’exploit que représente l’ascension de l’Everest, transformant ce qui était autrefois une aventure d’alpinisme pur en une quête commerciale. Certains professionnels de la montagne, comme l'alpiniste Pascal Tournaire, estiment que l’expérience a perdu son sens originel.
Le rôle indispensable des sherpas
Le documentaire d’Inoxtag mentionne le rôle des sherpas, mais certains critiques soulignent qu’il ne leur accorde pas l’importance qu’ils méritent. Les sherpas sont les véritables héros de l’Everest, exposés en permanence aux mêmes dangers, voire plus, que les grimpeurs étrangers qu’ils accompagnent.
Chaque année, plusieurs sherpas perdent la vie en aidant des touristes à gravir le sommet, souvent en portant de lourdes charges ou en préparant le terrain pour les grimpeurs. Sur l’Everest, 1 accident mortel sur 3 concerne ces guides courageux.
Un impact environnemental inquiétant
L’ascension de l’Everest ne se fait pas sans un impact environnemental conséquent. Avec l'augmentation du nombre de grimpeurs, le sommet le plus haut du monde se transforme en une véritable décharge à ciel ouvert. Les déchets s'accumulent, des tentes abandonnées, des bouteilles d'oxygène vides et des emballages plastiques jonchent les pentes.
Le documentaire d’Inoxtag montre brièvement ces déchets, mais ne développe pas en profondeur l'impact de ce tourisme massif sur l'environnement fragile de la région. En outre, le réchauffement climatique aggrave les risques d’ascension, provoquant la fonte des glaciers et augmentant la fréquence des chutes de blocs de glace et des avalanches.
Est-ce que tout le monde peut gravir l’Everest ?
La réponse courte est non. Bien que de plus en plus de personnes tentent l’ascension de l’Everest chaque année, ce n’est pas un défi à la portée de tous. Cela nécessite une préparation physique, mentale et financière considérable. De plus, même avec la meilleure préparation, la nature de l’Everest reste imprévisible et dangereuse.
L’exploit d’Inoxtag montre qu’avec de la détermination et un encadrement professionnel, certains peuvent réussir à atteindre le sommet. Cependant, il est essentiel de rappeler que cette ascension est loin d’être un simple challenge sportif ou touristique. Elle doit être abordée avec humilité, respect pour la montagne et pour les vies, notamment celles des sherpas, qu'elle met en danger.
Conclusion
L’Everest demeure une montagne mythique, attirant les aventuriers du monde entier. Si le documentaire d’Inoxtag a inspiré des milliers de jeunes, il ne faut pas oublier que gravir l’Everest est loin d’être à la portée de tout le monde. Les conditions extrêmes, les coûts exorbitants et les risques mortels en font une entreprise réservée à ceux qui sont prêts à tout donner pour réaliser leur rêve, avec une préparation adéquate et en étant conscient des dangers.
Le sommet du monde ne pardonne pas les imprudences, et ceux qui souhaitent suivre les traces d’Inoxtag doivent être prêts à affronter la réalité brutale d’un environnement hostile, où chaque pas peut être le dernier.